Quand l'abstrait et le figuratif fusionnent dans l'art de Jilba et d'Allé Assi
Quand l'abstrait et le figuratif fusionnent dans l'art de Jilba et d'Allé Assi
L’art est un lieu privilégié où les esprits, sans distinction de race, d’âge ou de niveau d’études, cohabitent, guidés par deux mots essentiels : création et génie. À l’occasion de l’exposition
« Conversation » entre le Belge Jilba et l’Ivoirien Allé Assi, du 3 octobre au 2 novembre 2024, on découvre un véritable melting-pot artistique – entre l'expérience et l'inexpérience – qui donne naissance à des toiles « magnifiques », un véritable régal visuel.
Ce jeudi 3 octobre dernier, à la Rotonde des Arts Contemporains d’Abidjan-Plateau, les peintres Jilba et Allé Assi ont dévoilé leurs œuvres, se situant au confluent de l'abstrait et du figuratif.
Le professeur Yacouba Konaté, directeur artistique de la galerie, reconnaît en Jilba un artiste confirmé sur les scènes professionnelles de l’art contemporain en Europe, et qui dialogue avec Allé Assi, « un jeune artiste ivoirien dont les accomplissements sont parmi les plus prometteurs ». « Cette exposition intitulée "Jilba et Allé Assi" réunit des artistes issus d’univers et de générations différentes, à la discipline plurielle.
Elle se veut une modeste mais déterminée mise en œuvre de la nécessité de la rencontre des cultures et des imaginaires, dans un monde de plus en plus fragilisé par les offensives des extrémistes violents, les appels à la haine et les intolérances face aux différences socioculturelles », commente le professeur et critique d’art.
L'un des exposants, Jilba, de son vrai nom José Ignacio Alvarez Baranga, présente des créations mêlant dessin, art et photographie, le tout imprégné de pensée philosophique. « Pour moi, l'art est très narratif.
Une œuvre d'art raconte une histoire, elle retrace le chemin que nous empruntons pour aller à la rencontre de nous-mêmes. Quand un artiste crée, il cherche qui il est. Il raconte ainsi une histoire à travers son œuvre. J'aime mélanger un aspect du réel avec un aspect imaginaire, totalement abstrait.
C'est pourquoi l'art abstrait et l'art figuratif m'intéressent, tout comme les technologies : il y a la peinture, la photographie, parfois des éléments comme un miroir. Tout est possible dans l'expression artistique », explique cet artiste espagnol originaire de Galice.
Ayant exploré divers domaines artistiques tels que la photographie, la scénographie, les spectacles et l’écriture, Jilba, qui vit et travaille à Bruxelles, en Belgique, révèle que la philosophie, avec son esprit critique – remettre tout en question pour déceler la vérité –, lui permet, dans sa soif de connaissance et de compréhension de lui-même, d'explorer sans limites.
« Ne jamais penser que j'ai atteint un objectif final. Jamais. Je suis toujours un explorateur, comme un enfant qui vient de naître », justifie l’artiste espagnol avant d’ajouter : « Je vais vieillir, bien sûr. Mais l’enfant intérieur en moi, je le conserve. Il vieillira avec moi, mais il restera toujours émerveillé. Même en vieillissant, il faut garder la capacité de s’émerveiller ».
Son jeune confrère ivoirien, diplômé de l’Institut National Supérieur des Arts et de l’Action Culturelle (Insaac), Allé Assi, se réjouit, quant à lui, d’avoir collaboré avec Jilba. Un travail accompli non pas en présentiel dans un atelier sous l’œil bienveillant de Jilba, mais à distance, dans un atelier virtuel, numérique. Allé Assi reconnaît avoir tiré le meilleur parti de cette collaboration, qui a désormais une incidence positive sur son art.
Lors du vernissage, Mimi Errol, critique d’art, a livré son interprétation de la technique d’Allé Assi, qu’il a aidé à révéler en organisant sa première exposition en 2022. « Pour bien apprécier le travail d’Allé Assi, il faut prendre du recul, c’est-à-dire mettre de la distance par rapport à l’objet.
Avec la distance, on voit du figuratif. Mais, plus on s’approche, on perçoit quelque chose qui éclate. Cela donne l’idée de la foule, du mouvement et du déplacement.
Il faut un effort d’acuité pour déterminer les images de la scène », souligne le critique, avant de révéler que la technique du peintre originaire d’Akoupé repose sur « un collage avec du print qui lui confère une identité forte, parlant à tous les hommes, de toutes les races ».
Patrick KROU